Bataille de Diên Biên Phu

Épilogue

Vendredi 8 mai 1954, Épilogue.

DIEN BIEN PHU le bilan

La chute de Diên Biên Phu sonna le glas de l’Indochine française et, à terme, celui de l’Empire français.

La défaite des forces du camp retranché n’était que d’ordre tactique mais elle eut des répercussions psychologiques considérables dans le futur Tiers Monde en général, mais surtout en France où les gouvernements de la IVe République qui se succédaient à un rythme accéléré trouvèrent, là, l’occasion de se débarrasser d’une guerre lointaine, rendue impopulaire en particulier par la propagande et par le sabotage (à tous les sens du terme) du Parti Communiste français, fort d’un électorat qui, à l’époque, représentait le quart des votants de notre pays.

On trouva un négociateur en la personne de MENDES FRANCE  qu’on se hâta de glorifier alors qu’à Genève il n’obtint aucune concession majeure.

Or, il avait encore des atouts en main car la défaite de Diên Biên Phu n’était pas d’ordre stratégique. Le corps

de bataille vietminh avait subi des pertes effroyables, non seulement à l’assaut du camp retranché, mais aussi sur la totalité du territoire indochinois qu’HÔ CHI MINH avait tenu à embraser pendant la bataille pour priver le corps expéditionnaire français de sa liberté d’action.

Le corps de bataille vietminh était exsangue, incapable pour longtemps de se redresser. Les Français avaient perdu la fine fleur de son Corps expéditionnaire, cinq bataillons de parachutistes et autant de bataillons de légionnaires et de tirailleurs mais, rapportées au demi-million de militaires en métropole et ailleurs, les pertes n’avaient rien à voir avec celles de la bataille de Verdun !

Mais il fallait à Genève se dépêcher de conclure et on brada. Et puis il fallut trouver des responsables. Les politiques, après s’être hâtivement défaussés, trouvèrent un bouc émissaire facile en la personne du général NAVARRE, le commandant en chef en Indochine.

NAVARRE, une fois rapatrié, tenta de se justifier. On l’en empêcha. Il lui fallut lutter pendant dix-huit mois pour obtenir du Ministre de la Défense qu’il acceptât de constituer une commission d’enquête. Cette commission, placée sous la présidence du général CATROUX, alors Grand Chancelier de la Légion d’honneur, devait se limiter à l’examen des circonstances militaires, en dehors de toute considération politique. Autant dire que c’était un coup d’épée dans l’eau I

Bien plus tard, le général NAVARRE écrivit un livre «Le Temps des Vérités». Cet ouvrage, bien documenté et argumenté, apporte des réponses précises aux interrogations que se sont posées, non seulement aux combattants de Diên Biên Phu en particulier et de l’Indochine en général mais aussi tous ceux qui se sont intéressés à ce conflit particulier.

Ce qu’en dit le général Navarre dans son livre.

Général Henri Navarre

POURQUOI LE CHOIX DE DIEN BIEN PHU ?

 » La défense du Laos avait toujours fait partie des obligations du commandant en chef en lndochine. On a vu que la question de l’en décharger avait été posée par les chefs d’état-major au Comité de Défense nationale de juillet 1953 mais qu’il n’avait pas été donné suite à cette suggestion. La mission demeurait donc.

Elle avait même pris un caractère d’autant plus impératif que, le 28 octobre, un traité venait d’être signé avec le Laos, par lequel celui-ci entrait dans l ‘Union française et la France s’engageait à le protéger. Cet accord était considéré par le Gouvernement comme un modèle dont devraient s’inspirer ceux en voie de négociation avec le Viêt-Nam et le Cambodge.

Ne pas le respecter quinze jours après la signature serait la ruine de cette politique.

Par ailleurs, j’ai dit les raisons militaires qui rendaient indispensable la défense du Haut Laos, sous peine de voir en quelques mois s’effondrer tout le Centre et le Sud indochinois.

Consulté par moi début novembre, le commissaire général me répondit que ne pas défendre le Laos était « impensable ».

Marc Jacquet, secrétaire d’Etat aux Etats associés, qui arriva en Indochine à la mi-novembre, m’exprima la même opinion ajoutant très péremptoirement que si le Viêt-minh atteignait le Mékong, le choc subi par l’opinion française serait tel qu’il rendrait impossible la continuation de la guerre.

La cause était entendue.

Par ailleurs dès l’automne 1953, par les renseignements de source sûre (décryptements), le plan vietminh se révéla à nous.

Il visait la destruction de nos maquis du Nord-Ouest indochinois, à la liquidation de notre camp retranché de Laï Chau puis à l’occupation de tout le Nord Laos. La base prévue pour ces opérations était Diên Biên Phu.

Henri Navarre

Le prédécesseur du général NAVARRE, le général SALAN, avait prescrit, en mai 1953, d’installer un centre de résistance à Diên Biên Phu, préférant ce choix à celui de Laï Chau et de Luang Prabang. Les généraux COGNY et GILLES avaient fortement recommandé que l’effort principal soit appliqué à Diên Biên Phu, ce dernier ajoutant que « les possibilités défensives y seraient meilleures“ qu’à Na San.

… « Dans l’ensemble et toutes réserves faites sur les inconvénients inhérents à toute base aéroterrestre en montagne, la position pouvait donc être considérée comme un pis-aller acceptable. Elle était meilleure que celle de Na San, de Laï Chau et de Luang Prabang.

Telles sont les raisons qui me décidèrent à occuper Diên Biên Phu et à y accepter la bataille. La solution était médiocre mais jouable contre l’ennemi auquel nous pouvions raisonnablement penser avoir affaire. En tout état de cause, il n’en apparaissait pas d’autre possible. La politique, a-t-on dit, consiste à choisir entre des inconvénients. Il en est souvent de même en stratégie, surtout dans la défensive. »

Henri Navarre

Et les hommes..?

Morts au combat ou disparus :  environ 3000
Blessés :  4436
Evacuations sanitaires jusqu’à la « fermeture » de la piste : 427
Prisonniers (dont 3252 blessés): 10 948
Evacués sanitaires après la chute du camp sur le Laos : 858 dont 59 du 8ème Choc
Libérés :  
3290
Morts en camp :   
 7658   

Et pour le 8e Bataillon Parachutiste de Choc.

Effectif bataillon : 814 à DBP  et  16 à Haïphong en BA Total: 830
Indochinois au bataillon :    
324
Tués au combat sans distinction d’origine :  163
Indochinois tués au combat :   65
Indochinois prisonniers : 
231
Indochinois disparus : 
28
Effectif fait prisonnier toutes origines : 651
Grands blessés libérés en mai : 
59
Européens prisonniers : 
365
Européens morts en captivité :  
96
Européens libérés : 269

Indochinois libérés : Aucun renseignement sur les Vietnamiens. Un seul cas de libération connu : 1 Cambodgien de la « 2 » retrouvé en 1992 au Cambodge par le bataillon français, le CPL CHAU SUON.

                                                                                                  

   

Les Viêts ont investi le camp, d’abord prudemment, puis lorsqu’ils s’aperçoivent qu’il n’y a plus de résistance, une immense clameur s’élève et des milliers de jeunes Bo-Doïs bien habillés pour la plupart, avec des armes neuves, envahissent ce qui reste du camp retranché de Diën Biên Phu. Le corps de bataille de Giap est devenu très jeune ; les Bo-Doïs savent à peine tenir leur arme. Les anciens, c’est vrai, pourrissent sur les pentes de tous les points d’appui.

Les français sortent des trous, dignes. Ils sont rassemblés par paquets et dirigés vers le pont Bailey. Les colonnes de prisonniers prennent alors la route du Nord par la RP41. Le calvaire commence pour ces ombres dont sept sur dix ne reviendrons pas.

Lire : Prisonnier du Viêt Minh dans l’enfer rouge

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