Jeudi 22 avril 1954
Situation générale :
Sur « Huguette » 1, le capitaine Chevalier regroupe ses soixante légionnaires survivants dans le réduit central. Les bo-doïs surgissent de terre, le capitaine de la Légion demande alors un tir de 120 sur sa propre position.
Deux compagnies du 6e BPC sont lancées en renfort mais elles ne passent pas.
Les Viets repartent à nouveau à l’assaut. « Huguette » 1 est submergée. A 23 heures, le poste radio de la 4e compagnie cesse d’émettre. Sans eau, sans vivre, presque sans munitions, les légionnaires ont tenu 4 jours face à un bataillon relevé chaque jour.
Fou de terreur, assommé de coups, ivre de faim et de fatigue, un seul légionnaire d’« Huguette » 1, Josef Unterleschner regagne le réduit central.
Situation au 8ème Choc
Inchangée
Etat des pertes
5 blessés
Survivre à Dien Bien Phu
La restriction de nourriture reste un souvenir marquant pour les combattants. La fatigue physique due au rythme intense des combats et au manque de sommeil, la fatigue nerveuse causée par le harcèlement continuel de l’artillerie et le danger ne peuvent être compensés par la qualité de la nourriture. En effet, cette dernière se limite presque exclusivement aux boîtes de rations individuelles.
Pendant la bataille, ont été largués sur le camp : 791 tonnes de riz, 195 T. de viande congelée, 493 T. de pain, 25 T. de légumes frais, 623 194 rations individuelles de combat, 22 760 rations collectives, 143 038 litres de vin, 26 529 litres de vinogel et 60 kg de moutarde.
Au cours des cinquante-six jours de siège, Diên Biên Phu a reçu une moyenne de 117 tonnes par jour alors que le tonnage minimal quotidien permettant de subvenir aux besoins du camp s’élève à 125 voire 130 tonnes. A partir du 14 avril, la nourriture est rationnée et le 20 avril, le PC GONO fait savoir à Hanoï que les combattants n’ont plus qu’un jour de vivres en réserve et que le 29 avril, ils sont au régime d’une ration pour deux et par jour. C’est en première ligne que la nourriture se fait de plus en plus rare à cause des difficultés d’acheminement.
De la fin avril au 7 mai, certaines unités ne perçoivent plus qu’une boule de pain pour quatre et une boîte de sauce tomate d’un kilo pour huit.
Témoignage de M. BRYARD :
… « Dans les rations du petit déjeuner, il y a du café, des pâtes de fruits, des cigarettes et une petite fiole d’eau de vie.
Pour le déjeuner : des sardines, du pâté et encore des pâtes de fruits. A l’échelon de la compagnie, on peut avoir des boîtes de 5 kilogrammes de haricots ou de lentilles qu’il faut faire réchauffer comme on peut. Ah ! il y a aussi le fameux corned-beef et les biscuits de guerre. Ceux-ci sont durs, alors il faut les faire tremper ; dans la boîte ils sont tout petits mais, une fois bien mouillés, ils deviennent comme des éponges ! … ».
Témoignage de R. PREGNON :
… « J’avais des gars, c’étaient des « Rapinours » ; ils allaient piquer dans les parachutages et se débrouillaient pour faire à manger. Il y avait toujours quelque chose pour moi… ».
Témoignage de N. ISSERT :
… « Des fois, nous avions une boîte de sardines à sept ! Des biscuits ou ce que nous trouvions. Après le 13 mars, il y a des fuyards chez nous, un Arabe s’est réfugié dans notre blockhaus sur « Éliane » 10. Nous lui avons demandé :
« D’où viens-tu? » Il a répondu : « Nous sommes partis, il y a eu débandade ! » « Ben, tu restes là mais tu nous fais à bouffer, tu te démerdes et tu cherches la bouffe ! » C’est donc lui qui nous a fait à manger. Il savait qu’avec nous il était à l’abri… ».
Vue aérienne d’ « Huguette »1 avec les tranchées
Le lieutenant D. BONELLI de la 1ère compagnie dans son abri. Il essaye d’adapter ses baguettes à sa boite de « singe ».
Avenue du lieutenant Jacques Desplats
81108 Castres Cedex