L'Ukraine - comprendre ...

d’après les chroniques de Jean-Cristophe Ploqin

L’attaque du territoire ukrainien par les troupes russes ce 27 février ne manque pas de nous interroger tant les conséquences de cette guerre sont imprévisibles.

Quel avenir pour cette jeune nation qui désire s’affirmer indépendante ?

L’Ukraine est un état souverain récent mais dont l’histoire est ancienne. Du IXe au XIe siècle, Kiev fut la capitale d’un royaume étendu qui entretenait d’intenses relations avec l’empire byzantin et contrôlait un fructueux commerce entre la mer Baltique et la mer noire. En 988, son roi se converti au christianisme sous la houlette du patriarcat orthodoxe de Constantinople. Cet épisode est au cœur du récit national russe qui en fait la genèse de l’empire des Tsars. Les territoires qui composent aujourd’hui l’Ukraine furent ensuite ballotés d’un suzerain à l’autre entre les couronnes de Lituanie et de Pologne et pour les régions occidentales soumis au contrôle austro-hongrois. Les cartes furent encore rebattues après la Première Guerre mondiale. Une déclaration d’indépendance fut rapidement effacée par les bolchéviques. L’Ukraine tomba pendant soixante-dix ans sous le joug communiste. La renaissance survint en 1991 avec l’effondrement de l’URSS.

Le nouveau pays a depuis cherché son chemin. Ses dirigeants ont d’abord tenté un équilibre entre la Russie et l’Occident, mais peu à peu le choix s’est imposé de candidater à l’Union Européenne et à l’OTAN pour construire un avenir coupé de l’héritage soviétique. Ces trente années d’indépendance n’ont pas permis la naissance d’un état fort, les divisions historiques et culturelles entre les régions de l’Est et de l’Ouest étant trop marquées.

L’annexion de la Crimée par Moscou en 2014 et la guerre provoquée par des sécessionnistes soutenus par le Kremlin autour du Donetsk et de Lougansk ont fragilisé le sentiment de sécurité, mais répandu la perception d’un destin commun contesté par le désir de Vladimir Poutine de contrôler les pays qui composaient l’ex URSS.

Quelles conséquences majeures pour l’Europe ?

L’invasion russe de l’Ukraine va avoir des répercutions majeures sur la construction européenne. Brutalement tous les pays du continent se découvrent un ennemi commun : un régime militaire brutal, violant les lois internationales et rompant la paix pour assouvir une soif primaire de puissance. Le choc est d’une ampleur équivalente à celui à celui de l’effondrement de l’URSS il y a trente ans. Mais son impact est presque inversé. Les démocraties conquérantes d’alors se sentent menacées. La priorité était l’extension commerciale sans frontière – avec la création de l’euro –, il faut aujourd’hui se protéger, défendre sa souveraineté, affermir sa résilience économique.

La prise de conscience de cette bascule était au cœur du sommet européen organisé à Versailles ces 10 et 11 mars. C’est une intense remise à plat des priorités de l’UE illustrée par les décisions historiques du gouvernement allemand pour se réarmer et se désengager de l’incroyable dépendance énergique du pays envers Moscou. La guerre en Ukraine pourrait agir comme un accélérateur pour une Europe plus politique et peut-être à géométrie variable. Au sujet déjà débattus pour investir dans des technologies et industries innovantes pour être autonome vis-à-vis de la Chine ou des Etats Unis,  vont s’ajouter des thématiques liées à la sécurité et à la défense commune liées à la protection du modèle démocratique et économique européen auquel de nombreux pays voisins aspirent.

Les répercussions immédiates de ce conflit sur notre quotidien laissent supposer que ces changements de paradigme seront douloureux et nécessiterons un esprit volontariste et unitaire pour gagner les défis qui nous attentent.

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